Avec l'oeil, l'homme appréhende un paysage ; il le voit, il le contemple et il voyage à l'intérieur par la pensée.
Mais l'oeil ne suffit pas pour comprendre de quoi le paysage est fait, ce qu'il nous donne à voir.
Pour cela, il faut entrer dans le domaine de l'analyse. Et la plus simple façon d'analyser quelque chose, c'est de le segmenter, de le découper, de l'ouvrir, de le disséquer.
Chacune des disciplines qui s'y intéresse tente de faire du paysage un assemblage de parties plus petites qu'elles pourront mieux cerner. Puis, elles proposeront de rentrer davantage dans le détail en créer d'autres subdivisions.
On va ainsi trouver de nombreuses dénominations pour ces portions de l'espace, scène ou image, vues suivant les "chercheurs ou artisans".
Par exemple, et en vrac : segment, fragment, élément, vue, géon, entité, unité, écosystème, hoplexol, pavé, système, matrice, parcelle, constituant ... et j'en passe.
La différence entre Entité Paysagère (expression inventé par Bernard Lassus en 1991) et Unité Paysagère est particulièrement subtile. Selon Yves Luginbuhl, la différence repose sur la présence, la forme ou l'organisation de caractères : relief, hydrographie, occupation du sol, forme d'habitat, végétation. Subtilité !!!
Mais quelle est la relation avec les mots de la vie ? Les mots utilisés par ceux qui vivent dans le paysage observé peuvent être différent des mots utilisés par le savant. Mais dans ce cas, il n'est pas encore le "sachant" car il ignore les vrais mots.
Certains diront qu'il s'agit d'un autre niveau de lecture... et ils auront raison. Mais doit-on passer cette dichotomie sous silence ? Non. Elle pourrait même s'avérer constructrice.
Apprendre à associer les "mots des vivants" avec les éléments constituants du paysage, c'est déjà mettre en relation deux démarches : celle de l'analyste et celle de l'enquêteur... ou plus franchement dit, celle du paysagiste et celle du chercheur en sciences humaines, qu'il soit ethnologue, sociologue, archéologue ou historien du paysage.
Un pas à franchir entre disciplines qui a déjà été effectué par certains d'entre nous (ils se reconnaîtront ;-) ).
Et cela est, il me semble, porteur d'espoir. Non seulement pour l'analyse et la compréhension des paysages, mais aussi pour un aménagement du paysage raisonné. Chercher à utiliser en même temps la géographie physique, la géographie humaine, l'écologie, l'histoire, ...pour comprendre un (son) paysage est un défi plaisant à relever.