vendredi 28 mars 2008

Réforme de l'Etat et paysage

Par une lettre du 19 mars 2008, le Premier Ministre, François Fillon, a adressé à l'ensemble des préfets de région et de département une lettre d'explication des grands principes de la Réforme Générale des Politiques Publiques, dite RGPP, sur l'organisation des services déconcentrés de l'Etat.
Dans cette lettre, il est clairement notifier que le niveau de pilotage est la Région.
Pour mémoire, les services déconcentrés de l'Etat sont des administrations de l'Etat en Région, à ne pas confondre avec ceux de la Région Haute-Normandie.

La future organisation devra reposer sur 8 structures.
Pour les problématiques liés au paysage, seules deux directions semblent concernées :
- la direction régionale de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt,
- la direction régionale au périmètre d'attribution de ministère de l'écologie, de l'aménagement et du développement durables et du ministère du logement.

Donc après un premier regroupement DRIRE - DIREN, il semble que la fusion avec la DRE (Direction Régionale de l'Environnement) soit en marche. Le logement et l'urbanisme ne seront pas séparés.

Un gros flou reste encore au niveau des services départementaux. Les DDE, qui ont déjà subi de grosses modifications vont en vivre d'autres encore. A commencer par la fusion déjà décidée avec les directions départementales de l'agriculture et de la forêt. Fusion qui pose d'ailleurs problème puisque le regroupement choisi au niveau régional n'est pas le même. A moins qu'à terme, l'idée soit de finir avec une seule direction groupant : agriculture, alimentation, forêt, écologie, aménagement... une super-méga-géante direction régionale. Irons-nous vers une DRE-DDE-DIREN-DRIRE-DRAF-DDAF ? Six services en 1 !

Les premiers changement auront lieu très vite à en croire F. Fillon.

le paysage a tout à y gagner, comme à y perdre. Réduire le nombre d'interlocuteurs peut être bénéfique, mais en général, au niveau d'une administration, cela s'est toujours traduit par une perte d'efficacité, une réduction du périmètre d'action comme on dit prudemment. Surtout si le projet de gestion commune des ressources humaines et des moyens de fonctionnement et d'investissement reste un objectif important, comme le précise la lettre du Premier Ministre en page 2..

En regard de l'efficacité du "bureau des paysages" du MEDAD, on peut être inquiet de l'avenir des décisions de ce service dans leur application dans une direction régionale encore plus grosse.

Verrons-nous là encore, une poussée de la dérèglementation ? Je ne vous cache pas mon inquiétude face au lobbying de l'aménagement du territoire qui réduira surement les actions d'environnement à de simples "mesures compensatoires", donnant ainsi une image d'écologie de façade.

jeudi 20 mars 2008

Bout de la rue - 2 - Juste une image ?

Il y a juste 2 mois, j'avais fait une première réponse à l'envie de l'atelier de figue. J'avais répondu par une pirouette. Mais depuis, j'ai regardé le bout de ma rue.
Il est changeant, aimable, parfois embrumé, souvent discret comme s'il n'existait pas.

En sortant du jardin, à 20 mètres à gauche, je tombe sur une route départementale, et de l'autre côté de la rue, voila ce que je vois.



Il y avait ce jour là une lumière particulière, et même si j'ai pris la photo un peu vite, il y avait une ambiance que j'espère restituer un peu. En regardant bien, dans le fond de la vallée, on peut deviner les deux pylônes du pont Flaubert , et le soleil ruissèle encore sur Rouen.

Et puis, je tourne la tête et je découvre cet autre paysage, si proche et si différent, la lumière jouant dans les arbres. Là encore, la photo n'est peut être pas géniale mais je voulais éviter le cliché. Le château s'enflamme avec le soir tombant.


Ce week-end, mon regard ira de l'autre côté de la rue.

lundi 17 mars 2008

Tagué pour 6 gestes

Laeti me demande de faire connaitre à la communauté du net 6 geste que je fais pour la santé de la planète (petit jeu simple et gratuit - règles du jeu en bas de ce message).
Et il n'est pas interdit de prendre exemple ;-)

Geste n° 1 : Recycler ?
Simple, sans doute, mais le prendre comme une question de tous les instants n'est pas si facile. Par exemple, lors d'un achat, il faut tout de suite envisager ce qui est recyclable ou non, et toujours favoriser l'objet qui sera le plus reconditionné, réutilisé à un autre usage ou détruit pour refaire autre chose.

Geste n° 2 : Manger ?
Mais ne manger que le nécessaire. On voulait bien parler ici des gestes quotidiens, et il n'y a pas plus quotidien. Je, tu, il, nous mangeons tous les jours, plus ou moins. Mais ne mangeons-nous pas trop, parfois sans même de plaisir ? Et en plus d'être souvent plus sain, on peut redécouvrir le vrai gout des choses. Les pâtes peuvent aussi se consommer sans crème ni fromage. Mais je ne m'empêche pas de varier les plaisirs.

Geste n° 3 : Marcher ?
A chaque fois que c'est possible, privilégier la marche à pied. Par exemple, le midi, pour me rendre de mon travail au restaurant administratif, et si rien ne me presse, c'est 40 à 50 mn de marche.

Geste n° 4 : Informer ?
Etre veilleur est pour moi l'une des clés de l'avenir. Il faut des éveilleurs de conscience, des allumeurs de responsabilité. Par ce site, par mes rencontres, par mon travail, mon action est toujours la même : montrer que nous sommes responsables de l'état de la planète et que nous devons tout faire pour la maintenir vivable pour nos descendants mais aussi pour tout être vivant.

Geste n° 5 : Connaitre ?
L'un des meilleurs moyens d'informer les autres est de rester soi-même toujours à l'écoute. J'ai souvent l'impression de vivre pour apprendre. Les noms des plantes, les sons que font les animaux, l'histoire des peuples, le fonctionnement de la planète... tout cela permet d'être en éveil. Connaitre est plus important que posséder.

Geste n° 6 : Jardiner ?
Un jardin a besoin de peu de chose pour vivre. Fini les pesticides, les arrachages sauvages, les anti-truc et anti-machin. Cette année, je suis passé à la main écolo... moi qui n'est jamais eu la main très verte. Mais tout devient simple en prenant la devise de Gilles Clément : "Faire le plus possible avec, le moins possible contre." (Le jardin planétaire) Exemple : pourquoi tondre la pelouse trop court alors que certaines plantes (graminées ou poacées) vont fleurir et se reproduire, et qu'une fois coupés certaines vont griller. Ne pas tondre limite l'arrosage.

Et j'en passe
Quand je pense à tout ce que je ne fais pas !!!, quel boulot encore ;-D


Voila six gestes qui sont très présents pour moi. Et je transmets cette même question à 6 autres personnalités diverses :

Sandrine : mon journal d'artiste

Esperluette

Laure Leforestier

Michel Lerond

Anna

Olivier Keller

*La règle du jeu est la suivante : si votre blog est tagué, voici ce que vous devez faire, enfin si vous avez envie de le faire, évidemment, car nous sommes des êtres libres.
* Mettre le lien de la personne qui vous a tagué
* Indiquer le règlement du tag
* Mentionner six choses ou gestes que vous faites régulièrement pour la protection de la planète.
* Taguer six personnes à la fin de votre billet en indiquant les liens de leurs blogs
* Avertir directement les personnes taguées sur leurs blogs.

mercredi 12 mars 2008

Dès demain !

Merci à ceux qui passe par ici... mais j'ai des demandes à honorer.
Demain je vais donc devoir répondre à Miss écolo, et également de fournir mes "bouts de la rue" pour enrichir les images de l'atelier de Figue.
J'ai également quelques compte-rendus d'ouvrages à vous livrer et des colloques à vous annoncer. Donc à très bientôt.

L'arbre qui cachera la forêt

Bernard Roman-Amat est directeur délégué à Agro-Paris-Tech à Nancy. Il avait été mandaté en février 2007 par Nelly Olin et Dominique Busserau, remplacés depuis par Jean-Louis Borloo et Michel Barnier, pour rédiger un rapport sur l'adaptation de la forêt française en regard des modifications climatiques.

Ce rapport est maintenant disponible sur le site du MEDAD (ici). La question posée est simple : Le changement climatique étant admis comme un phénomène réel, quelles actions doit envisager l'état pour faciliter l'adaptation de la forêt française ?
On pourrait imaginer que cette question reflète l'intérêt du gouvernement sur la qualité environnementale et la pérennité des grands massifs du territoire. Mais n'oublions pas que la forêt est également un formidable domaine économique avec la sylviculture, toute la filière bois, sans évoquer le chauffage pour lequel la demande (urbaine ou péri-urbaine) est très forte.


Mais la modification climatique va également totalement changer notre paysage forestier régional. On parle fréquemment du retrait du hêtre qui va peu à peu reculer vers le Nord et l'Est. Cette première conséquence a d'ailleurs déjà été anticipée par l'ONF. Bernard Roman-Amat a déjà ouvert la piste de réflexion en 2000 avec la parution de "Sylviculture et aménagement dans les forêts publiques pour le XXIe siècle : quelques pistes de réflexion" où il préconise d'anticiper. C'est dans la même ligne que devra s'incrire Philippe Leroy, le président du comité "forêt" du Grenelle de l'Environnement.

Aujourd'hui, nous voyons une forêt d'Eawy, vaste hêtraie, structurée par de grandes allées. Nous parcourons la forêt de Lyons associant chênes et hêtres majestueux ... mais cela est presque déjà une image du passé.

Les cartes établies par L. Badeau et JL Dupouey montrent de grandes transformations selon les deux scénarios A2 et B2 (modèle français d'évolution climatique en fonction de l'émission de GES). A2 est plus pessimiste que B2. La végétation est classée selon des dominantes caractérisées par les associations de quelques espèces arborées ou arbustives.

Aujourd'hui la Seine-Maritime est dite à dominante forestière de Groupe 6 type Atlantique nord (avec châtaignier). Le département de l'Eure est dans le même cas. Le Groupe 4 à dominante de hêtre n'est vraiment présente naturellement que dans le Pays de Bray. N'oublions pas que nos belles hêtraies actuellement ont été plantées il y a plus d'un siècle. Aujourd'hui le hêtre a du mal à se reproduire naturellement chez nous.
Dans le cas du scénario plutôt minimal B2, en 2100, le même Groupe 6 est cerné par le Groupe 7 à pin maritime dominant. Dans le cas du scénarion A2, plus pessimiste, presque tout la surface de l'Eure passe en dominante du Groupe 7, et le Groupe 6 est encore moins présent. Ce Groupe 7 est l'aire biogéographique dite "Atlantique sud".

Plus au sud, le Groupe 8 à dominante de chêne vert, de type méditerranéen passera en région Centre, et il ne serait pas improbable de voir cette espèce de chêne apparaitre naturellement ponctuellement dans la région de Chartres ou plus au Nord encore.
La vitesse de propagation du Groupe méditerranéen vers le Nord est estimée à 20 km tous les 10 ans pour B2 et 32 km/10 ans pour le cas A2, c'est-à-dire que le chêne vert "franchira" en masse la Loire avant la fin du siècle présent.

La paysage forestier est composite. la notion d'aire biogéographique ne représente qu'incomplètement la réalité attendue. Les espèces fonctionnent pas associations, par sympathie ou empathie. Les phytosociologues nous montrent le fonctionnement de ces ensembles. Les 7 groupes chorologiques (de répartition géographique des essences) sont composés chacun de plusieurs végétaux dominants qu'il convient de mettre en association avec d'autres. En voici quelques détails.
Le groupe 6 regroupe entre autre le châtaignier européen, la bourdaine, le néflier et le cèdre de Chypre. Le hêtre y est présent mais minoritaire, de même que les érables sycomores et planes.
Avec le groupe 7, nous devrions donc voir peu à peu arriver dans notre région de nouvelles espèces inconnues de nos paysages normands. Certes de façon encore marginale mais ils seront réellement présents. Les pins maritimes de plus en plus visibles, non seulement sur le littoral cauchois, près des sites balnéaires mais aussi en Pays d'Ouche donneront une nouvelle verticalité à notre côte. Le chêne tauzin pourrait bien s'implanter massivement dans les massifs forestiers du sud de l'Eure où les sols sont acides. La bruyère à balai remplacerai nos espèces locales actuelles dans les landes et les coteaux des vallées de l'Eure, de l'Avre et de l'Iton. Ponctuellement, vers la fin du siècle, nos enfants et petits-enfants verront sans doute des chêne verts, quelques cyprès toujours-vert, des pins parasol et pourquoi pas de la viorne-tin et des chênes liège (espèces dominantes et caractéristiques du groupe 8). Nous serions alors bien en peine de reconnaitre nos forêts normandes actuelles. Seules les chênes pédonculés seront à même de se tenir encore à leur place.

C'est un leurre de croire que nous pourrons empêcher, ou même retarder ce phénomène, car même le scénario le plus optimiste, celui qui envisage une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre en 2050, laisse voir de profondes modifications. Mais il faut l'accompagner, en permettant à la forêt d'être un lieu de vie, de loisirs, d'économie et un poumon pour notre planète.

Les 32 propositions de B. Roman-Amat sont regroupés en 5 grands thèmes : Recherche et développement, risques, production, biodiversité, gouvernance publique.
Parmi les idées, un bon nombre (plus de la moitié) repose sur des réorientations des politiques de structures para-publiques (ONF, GIP ECOFOR, IFN, IDF, les Etablissement Publics Scientifiques et Techniques, réseau Natura 2000 ...) dont le contrôle par l'Etat diminue d'années en années par externalisation des missions et réduction des crédits. Les autres propositions relèvent de la bonne volonté ou de la compétence de groupes que l'Etat ne maitrise pas ou peu, voire des collectivités (Agence Nationale de la Recherche, zones vertes des PPR, certification des exploitations forestières, bases de données régionales ...). Quelques propositions simples (23, 27) sortent du lot mais pourraient se révéler contreproductive si elle sont lues à travers le filtre des souhaits de réduction du périmètre d'action de l'Etat (la fameuse RGPP).

Il y a encore loin de l'idée à la réalisation.
Des infos complémentaires : sur actu-environnement.com, sur notre-planete.info, sur forets-et-climat.fr, et sur le site du MEDAD.

Clichés (de haut en bas) : Bernard Roman-Amat, forêt de Lyons-la-Forêt, l'allée des limousins dans la forêt d'Eawy, un chêne Tauzin, une viorne-tin, une bourdaine.

lundi 3 mars 2008

Envoyé spécial - France 2 - 06/03/08

L'émission de France 2 : "Envoyé Spécial" du jeudi 6 mars 2008 consacre un reportage à l'Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles (ENSPV).
Pour avoir la chance de fréquenter cette établissement, je peux vous dire à quel point ce lieu possède quelque chose de magique. Le "Potager du Roi", situé tout près de la célèbre Pièce d'eau des Suisses respire l'agronomie naissante dans la modernité de la fin de l'ancien régime. Précisons, que ladite Pièce d'eau à été creusé en relation avec la création du jardin puisque l'ensemble occupait un marais qui a été alors asséché, les sédiments extraits de l'étang ayant servis à combler la zone qui deviendrait le jardin potager. Cachés derrière les murs, en dessous du niveau de la rue et avec un micro-climat du à cette situation, les jardins possèdent des collections de plantes inestimables. Avec des espaces très ordonnés, des vergers où les fruitiers sont organisés en rideau, des parterres de légumineuses, des zones de plus grande liberté végétale.
On y trouve également les petits jardins que les étudiants investissent sous le regard compatissant (pour les plantes) des enseignants.

L'histoire du "Potager" est elle-même, passionnante. Jean-Baptiste La Quintinie, le créateur, a laissé son nom, entre autres, à un bâtiment de l'école et sa statue domine le Grand Carré. Allez découvrir bien plus sur le site qui est dédié à ce magnifique jardin : http://www.potager-du-roi.fr/



L'émission parlera essentiellement de l'école, de ses élèves et de l'esprit du "projet de paysage" qui les anime. En effet, la spécificité des étudiants de l'ENSPV est d'apprendre à lire un espace, à l'appréhender dans toutes les dimensions qui le composent et à établir un projet pour cet espace. Il ne s'agit pas d'aménager ... mais de créer, ou de re-créer.
C'est la principale différence entre un paysagiste qui sait créer l'harmonie entre les arbres, les plantes en utilisant son catalogue favori, et celui qui va au-delà. Ce dernier peut devenir un artiste de l'espace.
Le "projet de paysage", objet d'enseignement et de recherche, permet de mieux cerner la relation entre paysagistes et maitre d'œuvre. Cette notion a fait évoluer le paysagiste des jardins vers un statut de créateur-acteur du Landscape urbanism, devenant ainsi une personnalité incontournable avec l'architecte, l'urbaniste et l'ingénieur pour l'aménagement du territoire.

L'ENSPV, c'est aussi une ambiance. Certes, une certaine détente y est présente à l'image des écoles d'architecture. On y retrouve également le phénomène des "charrettes", nuits de travail de folie qui précèdent un rendu ou un concours. Mais il faut ajouter un solide esprit de travail collectif qui nait avec les expériences de terrain, et le travail en groupe pour les dossiers.
Espérons que l'émission de France restitue une partie de cette ambiance.

Jeudi 6 mars 2008, à 20 h 55, sur France 2.


L'Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles, vue du ciel.