samedi 10 novembre 2007

Le Paysage pour les débutants - 1

Voilà un thème qu'il fallait bien aborder un jour ou l'autre.
L'étude, la compréhension, l'envie de paysage n'est pas forcément une démarche innée. Il est utile pour certains de passer par certains préliminaires.

Tous n'auront pour objectif que de nous faire comprendre pourquoi être sensible aux paysages (et aux nombreuses autres notions qu'ils cachent) nous rend acteurs de la société.



Premièrement : Tenter une définition.

De nombreuses définitions existent. La plus classique, issu du dictionnaire est :
"Ce qui est sous l'étendue du regard".
Elle ne me satisfait pas car elle évoque trop la notion de "vue", terme qu'il faut garder en réserve.

Celle de Jean Robert Pitte (géographe) est couramment utilisée: « Le paysage est l’expression observable par les sens (la vue, l’odorat, l’ouïe), à la surface de la terre, de la combinaison entre la nature, les techniques et la culture des hommes. Il est essentiellement changeant et ne peut être appréhendé que dans sa dynamique, c’est à dire l’histoire qui lui restitue sa 4ème dimension ».
La présence du temps donne au paysage une épaisseur, une dynamique.
Cette définition contient en elle-même à la fois la "qualification" du paysage, la relation au "sensible" avec les 3 sens mentionnés, mais aussi le "monde savant" (nature, techniques et cultures). De nombreux chercheurs de notre domaine voient ici le coeur du débat, l'analyse de la relation nature-culture (présente dans plusieurs disciplines) semblant parfois la seul voie pour comprendre ce qu'est la paysage.


Autre définition, celle de la convention européenne du paysage : « Paysage » désigne une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l’action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations.

Courte et efficace mais nous renvoyant encore à la relation nature - culture (on finira par parler encore d'Edgar Morin). C'est celle qui est la plus courante (sous-entendue) dans les textes officiels actuels.

Mais ma définition préférée est celle donnée par Gilles Clément : Le paysage, c'est ce qui reste en mémoire lorsque l'on n'est plus sur le site, c'est donc une lecture subjective. Ce qu'il y a dans le paysage n'est que construction. Mais le paysage, c'est aussi le jardin. Et en cela, nous construisons du paysage, nous jardinons la terre close (finie) comme un jardin, nous sommes donc des artisans-jardiniers du "jardin planétaire".

Et en effet, on peut envisager que le paysage n'est jamais uniquement naturel mais toujours soumis à l'action de l'homme, jardiné, aménagé. Ces aménagements sont étudiés par de nombreuses disciplines et chacune d'elle propose donc une (ou plusieurs) définition du paysage.

En conjuguant toutes les définitions, on peut proposer :
Le paysage est à la fois un espace vu et observé, ensemble d'éléments soumis à l'homme à l'intérieur de cet espace, et dont la perception sensible nourrit la mémoire paysagère de l'observateur. L'observateur est médiateur en même temps que lecteur et interprète.

Pour faire simple, la paysage est d'un côté, il est observé. Le souvenir du paysage est de l'autre côté, il est l'expression de ce qui a été ressenti. L'observateur est entre les deux.

Cette explication rapproche la lecture du paysage de celle de l'expression artistique. Le spectateur n'est pas inerte, il interagit avec ce qu'il voit, il est lui-même acteur. Lorsque je regarde un paysage, j'agis sur lui en le mettant en ma mémoire.


A suivre : Le mot PAYSAGE


3 commentaires:

Anonyme a dit…

"la lecture subjective par un observateur, selon l'état général de ses sens et esprit du moment, d'un élément statique tel que le paysage"

ce que j'aime le plus, c'est le cheminement inverse : la vision d'un paysage qui ramène à un souvenir enfoui, à une odeur, un son...

Swingphil a dit…

Bien vu. Justement j'en reparlerai bientôt. Dans ma définition perso de chez perso, l'observateur-médiateur agit sur lui-même en faisant remonter du fond de sa mémoire les souvenirs des odeurs, des lumières, des bruits et de perceptions insoupçonnées. Ah ! la Madeleine de Proust.

Anonyme a dit…

Il est très intéressant de se (re)poser la question d'une ou des définition(s) du paysage. Pour moi, Proust c'est aussi le paysage auriculaire, celui que l'on nome souvent aujourd'hui paysage sonore. C'est cette notion de paysage sonore que je tente de montrer (faire entendre ?) ici :
http://desartsonnants.over-blog.com/article-13913845.html

Gilles